mercredi 20 juillet 2011

Lettre à Papi.

   Je ne peux pas écrire à Grand Père et passer à côté de toi Papi, père de mon père, mais, surtout Le grand père, aucune comparaison n'était possible avec Grand Père Jules, vous étiez diamétralement opposés mais avez su, chacun à votre manière, compenser le manque d'amour dont ont fait preuve nos parents envers nous.
   Pour toi aussi, il me faudrait écrire un livre, Papi, en fait, à vous deux, j'aurai de quoi écrire une encyclopédie tant vous m'avez appris! (là, je sens ton sourire coquin et ton sourcil qui se relève, ton oeil pétillant d'humour et d'intelligence) Papi, tu es parti beaucoup trop vite, trop tôt, mais je te pardonne ton impatience à nous quitter car je sais, au fond de moi, que tu étais fatigué et que tu aspirais à aller vers d'autres lieux plus riches de nouveautés, ainsi étais tu, aussi curieux qu'un enfant, avide de connaissance, de savoirs.
   Nous t'avions surnommé "le Papi baba cool" avec Pierre-Yves, une façon de te dire combien nous avons apprécié tous les moments que tu nous fis partager, je dis bien partager, tu ne nous a jamais donné le sentiment d'imposer ton autorité, tes savoirs, tu les mettais à notre disposition, libre à nous de les prendre ou de s'en détourner. Tu étais un véritable écologiste, nous avons découvert les joies du nudisme en ta compagnie avec toutes les libertés que cela induit, avec tous les respects que cela impose. Tu nous a appris à respecter la nature et toutes les formes d'êtres vivants qui la composent, des champignons vénéneux aux arbres, des plus insignifiants insectes aux formes les plus évoluées de la faune.
   Des gigantesques balades sur les sentiers des Pyrénées, vêtu de ton seul appareil photo, nous, nus comme des vers, libérés de toute contrainte, je garde le souvenir de ces instants de patience que tu nous imposais, assis près d'une plante à fleurs, dans le but de prendre une abeille butineuse au seul piège de ton objectif.Ô Papi, que ces moments me manquent, cette magie qui se dégageait de toi quand, le doigt sur la bouche, tu nous intimais le silence, nous laissant croire que ta seule volonté faisait choisir à l'abeille la bonne fleur et que nous étions convaincus de ton pouvoir, majesté de l'enfance que cette douce naïveté.
   A chacune de nos vacances chez toi, tu nous avais bricolé un jouet qui avait d'autant plus de valeur que c'est toi qui les fabriquais, sans compter les piles de "pif gadget" que tu achetais consciencieusement pendant notre absence, au grand dam de notre père qui, pour lors, te traitait de "communiste", nous faisant rire aux éclats, les frères et moi! Comme tu travaillais pendant un mois sur les deux où nous étions présent, nous disposions de quatre à cinq semaines pour torturer Bonne Maman, ta chère épouse que je n'ai, malheureusement, jamais conçue comme une grand mère, aujourd'hui encore je ne me l'explique pas. C'était notre jeu préféré, d'autant qu'elle ne nous menaçait que de te prévenir de nos intrépides farces et que tu n'élevais jamais la voix, je ne sais pas si tu en as eu conscience Papi, mais nous étions terrorisés à l'idée que le jour où tu ferais une colère, ce serait le pire ouragan qui soit, rendus méfiants par un père à la main leste, pour ne pas dire plus!
   Puis nous avons grandi, tu as su garder le contact avec nous et je te dois les bases de maçonnerie que tu m'as inculqué et le souvenir de cette extension de la maison parentale que j'eus l'honneur de bâtir en ta compagnie. J'ai conscience Papi, d'avoir partagé avec toi les dernières leçons de vie que tu avais à nous apporter avant de partir, je suis un privilégié parmi tes petits enfants que nous fûmes les frères et moi.
    Je n'ai gardé de toi que ces images de vie, n'ayant pas assisté à ton enterrement, je me rends compte que c'est en écrivant ces lignes que je fais mon deuil de toi, ô mon Papi, trente ans après que tu nous ais quittés je prends conscience que tu es mort. Mais les larmes qui sillonnent mes joues ne sont que des larmes de joie, celle d'enfin te dire au revoir Papi.
   Tu es, pour toujours, l'homme qui a le plus marqué ma vie, tu m'as appris la vie avec tout ce qu'elle comporte de plus noble et tu m'as donné l'intelligence, la vraie, celle du coeur, tu m'as donné l'envie d'aller toujours plus loin et je te dois cet amour du livre qui m'a appris, bien plus que tous les enseignants et autres donneurs de leçons que la vie nous force à fréquenter, tout ce que je sais aujourd'hui.
   Voilà, Papi, je vais m'arrêter là, il n'est nul besoin que je te dises pourquoi, je sais que tu sais, je n'ai plus qu'à te saluer, ô mon Papi, et te dire encore merci de m'avoir permis d'être ton petit fils, c'est toujours un grand honneur d'être aimé d'un homme tel que toi et ton souvenir est aussi vivant que l'immense amour que je te porte.
                Ton petit fils qui t'aime, Alain.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire