dimanche 25 août 2013

Toutes voiles dehors.

   C'est décidé, je vais mettre les voiles, embarquer sur un bateau et me laisser porter au gré des flots, cap sur la mer. La liberté d'aller où le vent porte est la seule voie pour se libérer des contraintes, sur l'océan chacun peut décider du cap qu'il veut prendre. "Équipage au complet, tout le monde à bord et larguez les amarres"!
   Commençons par quitter le port, manœuvre difficile, à faire au moteur, une légère odeur de gas-oil envahit l'air mais cela ne durera pas, après avoir louvoyé entre les nombreux bateaux s'ouvre, enfin, l'immensité des flots qui tendent les bras aux nouveaux aventuriers. Abritée par la digue,  la mer ressemble à une plaine herbeuse, calme plat, tout juste quelques risées pour rappeler que l'on quitte la terre.
   Là, le dernier bout de béton franchi, s'ouvre la vue sur la mer qui semble sans fin, que de l'eau, à perte de vue. Quelques îles rappellent que nous ne faisons que tourner le dos à la côte, mais les regards se refusent à en faire le constat, les yeux sont tournés vers le désert bleu, les cœurs se gonflent et chacun prend sa place à la manœuvre pour hisser les voiles. "Envoyez la grand voile, hardi les gars", le vent se lève promettant de gonfler la toile, libérant les énergies, emmenant le navire loin de tout. "Envoyez le génois", le bateau prend de la vitesse, là ce sont les cœurs qui se gonflent, c'est parti!
   Les premiers instants sont magiques, le vent pour seul moteur, les reflets du soleil sur l'eau, l'air iodé envahissant les poumons, tout contribue à l'apaisement, un calme bienfaiteur nous emplit. Le vent gagne en force, accélérant l'avancée du bateau qui, maintenant, fend les flots de son étrave, quel sentiment de bien-être! Oh, un couple de dauphins vient nous tenir compagnie, ils sont beaux dans la fluidité de leurs déplacements, on dirait qu'ils essaient de communiquer, mais nous ne parlons pas le même langage, peu importe, sans doute nous souhaitent ils la bienvenue en leur paradis. Mais pourquoi semblent ils opérer des demi-tours vers la côte en nous regardant et en émettant des petits cris? Là encore, notre humaine ignorance des mœurs animales ne nous permettent pas de décrypter leur ballet.
   Le vent forcit un peu plus, les vagues se creusent nous entraînant dans un mouvement oscillatoire de plus en plus appuyé, certains visages se tendent, d'autres pâlissent, certains estomacs se nouent, d'autres ne sauraient tarder à se dénouer! Le souffle du vent se fait plus capricieux et, de rafale en rafale, gagne encore en puissance, les passagers s'accrochent au bastingage, certains se penchent par dessus afin d'éliminer précipitamment un trop plein tout à coup constaté.
   La mer grossit, la houle est de plus en plus forte, les hommes de plus en plus malades, les gilets de sauvetage sont sortis et enfilés, les plus fragiles se hâtent de se mettre à l'abri dans la cabine, pour en ressortir prestement, plus malades encore! Les vagues submergent de plus en plus fréquemment le bateau, tous sont trempés, grelottant dans le froid du vent devenu très vif, Les haubans craquent rajoutant à l'inquiétude des marins non aguerris, la peur finit de dénouer les estomacs les plus fragiles, mais la mer, de plus en plus démontée, ne permet pas de se pencher, heureusement que l'eau salée vient balayer le pont à chaque embardée du navire qui semble comme livré à lui même.
   Le skipper, habitué à affronter tous les temps, propose de faire demi tour, faisant l'unanimité, plus personne ne veut de cette liberté, tout le monde veut retrouver cette terre honnie quelques heures plus tôt, par pitié, de grâce, pour ne plus jamais la quitter! C'est le moment que choisit le cuistot pour proposer quelques aliments salvateurs, "c'est que ça creuse, les émotions", se sent il obligé d'ajouter, achevant les quelques survivants qui se précipiteront pour se vider des dernières traces d'un petit déjeuner copieux, mais certes pas pour faire de la place aux mets suivants!
   Arrivés au havre portuaire, chacun se précipitera sur les quais, vers les voitures afin de vite partir pour mieux ne jamais, ô grand jamais, revenir.

jeudi 8 août 2013

Maudit Jerzual.

   Il me faut vous parler de cette rue si particulière de Dinan, une côte vertigineuse, ou une descente, selon le sens dans lequel on l'aborde. En tout cas, une dénivelée impressionnante, elle était la voie d'accès à la ville pour ceux qui venaient de Rennes et plus d'un bœuf a dû casser son licol en ce lieu. Aujourd'hui elle est devenue le lieu de passage obligé pour tous les touristes qui visitent notre belle ville.
   Les maisons qui la jalonnent sont très anciennes et ont conservé les colombages et autres volets qui lui confèrent cet air du moyen-âge si propice à la rêverie. Travaillant dans l'une de ces magnifiques demeures, j'ai été le témoin des déambulations touristiques qui m'inspirent ces écrits.
   Il y a, en cette rue, deux types de touristes, les descendants et les montants, abordons le cas des premiers.
   Ils s'engagent dans cette surprenante rue le cœur léger, les regards oscillants entre les façades des maisons et les pavés aux jointures incertaines. Rappelant  à l'ordre les enfants qui se laissent entraîner par cette descente dans des courses effrénées, les parents sont souriants et décontractés. Les vitrines des ateliers d'artistes artisans permettent de petites pauses, le temps de prendre conscience que les prix sont trop élevés pour leurs bourses, ils zigzaguent allègrement. Les conversations sont soutenues et surprenantes, entre ceux qui, encyclopédies vivantes, savent tout ou le croient et ceux qui, contraints et forcés, écoutent d'une oreille distraite ces fallacieux discours. Mais je dois bien dire que c'est l'émerveillement qui prédomine et les questions, parfois naïves, des enfants ne font qu'ajouter  à la magie de l'endroit.
   Pour eux, pas de doute, cette rue est la plus belle de Dinan.
   Certains, cependant, n'ont pas cette vision idyllique de cette rue, ce sont les malheureux qui la remontent. Je travaille dans la partie haute du Jerzual, ceux que je vois arriver sont donc au bout de leur peine, ils ont le visage rougi par l'effort, essoufflés, éreintés serais je tenté d'écrire. Point de paroles, point de regards sur les beautés qui s'offrent à eux, seule la vue du terme de leur calvaire compte pour eux. Les enfants, loin de s'extasier, sont en larmes et crient au secours vers des parents au bord de l'apoplexie. Ils ne cherchent qu'un endroit où s’asseoir, se reposer devient impératif, mais les deux petits bancs de granit sont toujours occupés. Il reste la terrasse de l'opportuniste marchand de glaces qui, avouons le, bénéficie là d'une place fort stratégique!
   Pour eux, pas de doute, cette rue est la plus horrible de Dinan.
   Voilà, ce lieu magnifique s'appelle le Jerzual, mais, croyez moi sur parole, rares sont les Dinanais qui s'y aventurent. Ils laissent ça aux touristes, préférant déambuler dans les rues moins pentues mais tout aussi pleines de charme de notre jolie cité.
   Pour eux, pas de doute, cette rue est à éviter!

dimanche 4 août 2013

C'est le caca!

   Je veux vous parler de cette fonction qui nous est propre, bien qu'impropre, ce grand moment de la vie où l'on est contraint de s'enfermer seul face à soi même, l'inévitable "grand moment de solitude", le caca t'apostrophe, plus communément nommé : "j'ai une de ces envies de chier!". C'est dans l'isolement des toilettes que nous nous retrouvons tous, riches ou pauvres, gros ou maigres, blancs ou noirs, même si, dans la deuxième proposition, l'on y va moins souvent! C'est un délicieux moment où l'on a rien d'autre à faire que de refaire le monde, après tout, qu'on le veuille ou non, c'est un acte de création que nous y allons commettre!
   Nous avons, pour ce besoin commun, trouvé des parades aussi différentes que peuvent l'être des humains désemparés. Il y a ceux qui, forts de leur personnalité, affrontent le danger de face, seuls avec eux même. Il en est, parmi eux, plus audacieux encore, qui mettent un miroir sur la porte, côté intérieur! Il y a les angoissés qui n'allument pas la lumière et se bouchent les oreilles pour ne point savoir ce qu'ils font.
   Chez d'autres, le lieu est insonorisé permettant l'expression de l'effort consenti (surtout senti!) à très haut volume sonore. Que dire de ceux dont les toilettes sont si bien tenues que l'on se demande s'il leur arrive d'y aller, on n'ose pas même y faire un petit pipi!
   Bref, tout énumérer serait long et fastidieux (mais pas chiant!), j'en viens donc aux sujets qui m'intéressent plus particulièrement puisque j'en fais partie, le lecteur de toilettes. Quel endroit peut être plus propice à la lecture que cet isoloir naturel, où les autres nous sachant là pour une grosse commission, vu le temps écoulé depuis notre entrée en scène, auront peur de s'y précipiter dès notre sortie. En ce lieu, plutôt que de perdre son temps, on peut se délecter de lecture, la mieux adaptée, à mes yeux, étant la bande dessinée. Elle dure juste le temps d'un caca de raisonnable durée, c'est le temps de référence, celui qu'il ne faut pas excéder si l'on veut éviter le regard réprobateur de son suivant, surtout si ce dernier se pince le devant du pantalon en se dandinant.
   Le roman fait, quand à lui, prendre de gros risques, on peut céder à l'envie de finir un chapitre entier, ce qui est, parfois, long! On peut choisir des auteurs chiants mais ils sont souvent les plus longs dans l'intrigue. Il est conseillé d'opter pour les nouvelles, à chaque histoire son caca!
   En tout cas, je pense que c'est un endroit qui devrait être agrémenté de livres divers et variés sans, cependant, aller jusqu'à la bibliothèque, sinon le choix d'un livre, à lui seul, durerait le temps imparti pour l'action!
   Pour finir, je me vois contraint de parler des revues torche culs, tous ces magazines qui nous parlent de gens que l'on ne connaît pas, mais qui font une actualité propice à être lue dans les chiottes, avant que d'y finir eux même!
   Allez, n'en faisons pas un caca nerveux, cela pourrait nuire à notre transit intestinal!