jeudi 8 août 2013

Maudit Jerzual.

   Il me faut vous parler de cette rue si particulière de Dinan, une côte vertigineuse, ou une descente, selon le sens dans lequel on l'aborde. En tout cas, une dénivelée impressionnante, elle était la voie d'accès à la ville pour ceux qui venaient de Rennes et plus d'un bœuf a dû casser son licol en ce lieu. Aujourd'hui elle est devenue le lieu de passage obligé pour tous les touristes qui visitent notre belle ville.
   Les maisons qui la jalonnent sont très anciennes et ont conservé les colombages et autres volets qui lui confèrent cet air du moyen-âge si propice à la rêverie. Travaillant dans l'une de ces magnifiques demeures, j'ai été le témoin des déambulations touristiques qui m'inspirent ces écrits.
   Il y a, en cette rue, deux types de touristes, les descendants et les montants, abordons le cas des premiers.
   Ils s'engagent dans cette surprenante rue le cœur léger, les regards oscillants entre les façades des maisons et les pavés aux jointures incertaines. Rappelant  à l'ordre les enfants qui se laissent entraîner par cette descente dans des courses effrénées, les parents sont souriants et décontractés. Les vitrines des ateliers d'artistes artisans permettent de petites pauses, le temps de prendre conscience que les prix sont trop élevés pour leurs bourses, ils zigzaguent allègrement. Les conversations sont soutenues et surprenantes, entre ceux qui, encyclopédies vivantes, savent tout ou le croient et ceux qui, contraints et forcés, écoutent d'une oreille distraite ces fallacieux discours. Mais je dois bien dire que c'est l'émerveillement qui prédomine et les questions, parfois naïves, des enfants ne font qu'ajouter  à la magie de l'endroit.
   Pour eux, pas de doute, cette rue est la plus belle de Dinan.
   Certains, cependant, n'ont pas cette vision idyllique de cette rue, ce sont les malheureux qui la remontent. Je travaille dans la partie haute du Jerzual, ceux que je vois arriver sont donc au bout de leur peine, ils ont le visage rougi par l'effort, essoufflés, éreintés serais je tenté d'écrire. Point de paroles, point de regards sur les beautés qui s'offrent à eux, seule la vue du terme de leur calvaire compte pour eux. Les enfants, loin de s'extasier, sont en larmes et crient au secours vers des parents au bord de l'apoplexie. Ils ne cherchent qu'un endroit où s’asseoir, se reposer devient impératif, mais les deux petits bancs de granit sont toujours occupés. Il reste la terrasse de l'opportuniste marchand de glaces qui, avouons le, bénéficie là d'une place fort stratégique!
   Pour eux, pas de doute, cette rue est la plus horrible de Dinan.
   Voilà, ce lieu magnifique s'appelle le Jerzual, mais, croyez moi sur parole, rares sont les Dinanais qui s'y aventurent. Ils laissent ça aux touristes, préférant déambuler dans les rues moins pentues mais tout aussi pleines de charme de notre jolie cité.
   Pour eux, pas de doute, cette rue est à éviter!

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