samedi 14 mars 2020

Le courage de partir.

   En cette période de renouveau printanier je suis en train de bourgeonner, mes velléités de départ prennent de plus en plus forme, au gré de ma forme mais pas de mes formes puisque je reste désespérément maigre. Mais les longues marches journalières depuis un mois me prouvent de plus en plus que je dois partir pour où et ce sans plus tarder, avant qu'il ne soit trop tard en quelque sorte et que je reparte encore sans y être préparé.
   Les amitiés que j'ai pu lier à Saint-Malo ne semblaient pas croire cela possible, c'était avant que mon dos ne se redresse et, avec lui, ma tête d'ailleurs je recommence à marcher dans les nombreuses crottes de chiens sur les trottoirs. Seulement ça ne m'irrite pas, au contraire ça prouve que je ne regarde plus où je mets les pieds, ils décident tous seuls de la direction à prendre et de la durée de la randonnée du jour. cela permet à mes yeux de vagabonder au gré des richesses qu'ils découvrent, transmettant à mes doigts la charge de le raconter puisqu'ils ont plus de vocabulaire que mon cerveau. De plus ce dernier est peu en état de fonctionner avec cette foutue épilepsie, alors je préfère me passer de lui, officiellement, afin qu'il n'entrave pas ma démarche.
   L'arrêt du tabac et de ses sous-groupes n'y est pas étrangère, outre l'odorat et le goût le souffle revient lui aussi me permettant à nouveau de ne pas manquer d'air, le même que celui qui va me pousser dans la bonne direction, celle de l'aurevoir. Là est réapparu un personnage que j'avais complètement omis dans l'histoire de ma vie, moi-même. Mais si je ne me suis pas étranger, c'est un nouvel ami qui apparaît à ces personnes qui ne m'ont connu que dans les méandres de la maladie et des luttes internes qu'elle provoque et ils croient enfin que ce pèlerinage n'est pas une lubie ou un rêve.
   Alors le discours suit les idées, ils regardent l'aventure comme un possible et plus comme impossible ou seulement pour eux-mêmes et, donc, me taxent de courageux d'ainsi décider ce que j'entreprends. Mais il n'est nul courage dans une décision, juste une envie de concret, juste une envie d'un départ qui serait le dernier vers un lointain possible, partout mais ailleurs encore une fois, une ultime fois animée par la seule vraie foi, celle que chacun accorde à son pouvoir, décider.
Ce n'est pas même une forme de courage, plutôt une illusion du courage.
   Partir pour être sûr de son courage, celui de quitter, sans doute définitivement, ce monde qui est le notre et qui ne me sied plus, mais il  est d'autres séparations qui demanderont vraiment du courage et de l'honnêteté. Celles des parents des amis et, plus que tout, des enfants qui devront eux aussi faire preuve du courage de me laisser doucement m'effacer de leurs vies, sauf à me rejoindre à certaines étapes de ce grand voyage que je veux faire, partir sous d'autres cieux avant que de partir aux cieux.
   Ce n'est pas le courage de partir qui me fait décoller mais une nécessité du départ, pour faire la seule chose que je puisse faire sans dégâts collatéraux, marcher et encore marcher sans plus arrêter, jusqu'à l'épuisement des dernières velléités et l'extinction de ce feu qui brûlera toujours dans les cœurs de ceux qui m'aiment, ils sauront se reconnaître.
   Moi aussi je vous aime et c'est pour ça que je pars, c'est pour vous protéger de moi que j'ai le courage de partir.

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