dimanche 9 décembre 2012

J'aime l'attente.

   J'aime l'attente, pas la tante, ni même la tente, juste l'attente latente devant la porte battante, pas vacante mais sans bacchantes, pas la porte, juste la tante pas impotente, ni importante, je tente de vous expliquer, ce n'est pas un procès que j'intente, simplement j'aime l'attente! Bon, maintenant que vous avez compris l'intitulé de ce texte, je mets un terme à l'attente qui vous ronge, l'entente entre nous sera, enfin, parfaite.
   J'ai vécu, cette semaine, le dernier acte de ma présence sur les listes de chômeurs. Je suis là pour un ultime rendez vous avec un conseiller de pôle emploi. Je viens me faire attribuer ma "prime de licenciement", entendez par là l'aide qui est allouée aux demandeurs d'emploi qui créent leur entreprise. Je suis dans la dernière ligne droite et l'attente, si elle est toujours aussi longue, ne me fait pas perdre patience, j'ai le coeur léger de celui qui sait où il va.
   C'est en observateur attentif que j'opère, c'est un moment privilégié que je vis en ces instants, c'est, j'ose l'espérer, la dernière fois que je croise mes "collègues" désoeuvrés. Je les regarde d'un oeil plus compatissant, nous ne sommes plus en concurrence, C'est comme si nous n'appartenions plus au même monde, la mémoire humaine est parfois surprenante, mais les faits sont là, je me sens étranger puisque mon attente n'est plus la même que les leurs.
   Le premier constat est quelque peu effrayant et sans appel, le marché de l'emploi s'est grandement dégradé depuis mon inscription en ces lieux et le panel des gens touchés par le chômage s'est élargi. Il y a beaucoup de nouveaux inscrits, cela se voit à leurs mines déconfites et s'entend aux questions, tellement pleines d'espoirs qu'elles en paraissent naïves, qu'ils posent aux conseillers.
   Eux aussi, sont en pleine attente, mais je crains qu'ils n'y prennent pas autant de plaisir que moi. Il y a ceux, éternels, qui ne sont là que pour obtenir un sursis à leurs allocations, il y a ceux qui, quoique l'on fasse, n'obtiendront plus de nouvel emploi, trop vieux, trop incapables, trop fainéants, trop feignants de chercher ou, tout simplement, trop malchanceux. Mais il y a aussi ceux, qui sont la majorité, des personnes présentes en ce lieu maudit contraintes et forcées et qui sont remplies de l'espoir que cela ne durera pas trop longtemps. Leur seul point commun étant qu'ils sont tous dans l'attente ( non, pas dans la tente...et moins encore dans la tante!), mais ils ne savent pas exactement de quoi.
   Mais voilà, je suis devenu si différent de tous ces gens que, m'étant muni d'un crayon et d'un papier pour écrire ce texte, j'eus à peine le temps d'en tracer les prémices que j'entends quelqu'un m'appeler, je n'aurais attendu que quelques minutes, passant devant ces personnes qui étaient là avant moi et qui le resteront bien après! J'aimais l'attente et ils m'en ont privé, la dernière attente a pris fin de façon inattendue, devenu l'objet de toute leur attention, je n'ai plus à attendre et, contre toute attente, j'en ai éprouvé un certain plaisir car mes futurs clients, eux, n'aiment pas l'attente!

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