dimanche 7 octobre 2018

L'adieu aux armes.

   Les dégradations de ma santé me laissent à penser que je ne traînerai pas ma carcasse aussi longtemps que j'eusse aimé le faire. Je ne m'en offusque pas, c'est la vie et mourir en fait partie, seulement je veux le faire debout.
   Ma seule véritable frustration est de ne pouvoir faire tout ce qu'il me reste à faire, je dois établir une hiérarchie dans mes envies et agir en conséquence, abandonnant ainsi cette inconséquence qui a tant enrichi ma vie. Mais si je ne suis plus inconséquent, je crains d'y perdre ce grain de folie douce qui m'a permit de tant prendre de plaisir à vivre des expériences inédites.
   Alors je dois continuer à dédaigner les problèmes, quand bien même ils sont si virulents, mais je ne saurais le faire avec les mêmes exutoires, je dois abandonner certaines passions parmi les plus fortes et c'est là que le bât blesse. Il est des pages que l'on ne peut tourner aussi facilement, le déchirement empêtre le mouvement, le coeur s'en mêle faisant exploser le chagrin, puisque c'est bien d'explosions qu'il s'agit.
   Je dois faire mon adieu aux armes et de simplement l'écrire me rend cette idée inadmissible, mais il ne saurait en être autrement. Mes forces vives m'ont abandonné, je n'ai plus assez de cette énergique folie qui m'a tant animé, ce n'est plus mon cerveau qui décide du mouvement de mon corps (si, si, il m'est arrivé de réfléchir avant d'agir, parfois!).
   Il me faut tenter de refermer cette plaie à mon coeur par d'autres exutoires, qui pourront éveiller ma passion éteinte tant qu'elle fume encore, il me faut me recharger, à l'instar de mes canons, si je veux tonner encore! Mais comment accepter l'inacceptable, j'ai beau chercher, rien ne pourra plus me permettre de pratiquer la reconstitution médiévale, je lui ai trop donné pour accepter de n'être qu'une présence.
   J'ai bien commencé à étudier des textes anciens afin d'y trouver l'inspiration, mais je sens qu'il m'est plus difficile d'apprendre. Là encore, il me faudrait un temps dont je ne semble plus disposer, les jours passent de plus en plus vite. Alors je vais marcher jusqu'à l'épuisement pour, qu'abruti de fatigue, je puisse m'endormir sans questionnements.
   Mais le pire n'est pas là, il est des vérités que l'on ne saurait annoncer à ses proches sans anicroche, alors je mens par amour, acceptant d'être délaissé quand j'aurais besoin d'être entouré. J'ai toujours survécu, ils ne voient pas comment le roc pourrait se fendre, ne se rendent pas compte que c'est par l'intérieur que les fissures gagnent du terrain.
   Je dois juste leur prouver que je les aime vraiment, c'est ma dernière épreuve donc je ne me plains pas, pour ne pas les encombrer. C'est plus efficace que je n'aurai pu l'espérer, mais au moins je sais que je peux disparaître sans que ça ne provoque trop d'émois, au moins partirai-je le coeur léger!
   Faire un adieu aux armes
   Sans verser de larmes
   Le désespoir enfonçant sa lame
   Jusqu'au tréfonds de l'âme?

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