lundi 7 juin 2021

Ca gratte.

    Je ne sais pas si c'est lié aux diverses suppressions de nos droits à se déplacer librement, mais depuis notre récente libération je croise de plus en plus d'adeptes des jeux à gratter lors de mes pérégrinations. N'étant pas un adepte de l'enrichissement autre que celui de ma curiosité, je dois avouer qu'il m'a fallu étudier de plus près ces étranges personnages, qui sont souvent des personnes âgées, par ailleurs.

   Habitant un quartier défavorisé, si ça existe encore, j'ai pensé que cet acharnement n'était lié qu'au désir d'enfin déménager de ce lieu oublié et de plus en plus replié sur lui-même. Bref, je m'égare, oubliant les héros de ce texte, qui en auront profité pour gratter de plus belle, soyez en certains. Or donc, ce n'est pas pour eux-mêmes qu'ils jouent, mais pour offrir à leur descendance un peu de cette dignité qui leur a été refusée. Mon esprit, aussi naïf que curieux, pensa alors que dans les quartiers dits riches de la ville nul ne grattait puisqu'ils ont déjà plus qu'il n'en faut. Que nenni, ils sont tout aussi appâtés que les précédents mais ils n'usent pas du même mode opératoire, ils font leur affaire dans un lieu public, certes, mais ils ont la décence de se retourner afin que nul ne voit le geste précipité qui dévoilera, sans nul doute, leurs gains... ou, le plus souvent, leurs mines déconfites.

   En tous les lieux, en tous les cas, ils sont plus visibles et paraissent plus nombreux qu'avant, lorsqu'ils se cachaient, voire se terraient, afin de cacher leur potentiel gros lot, que nul autre ne sache surtout. Puis sont arrivées ces périodes d'isolement forcé pendant lesquelles ils se sont sentis contraints à l'enfermement, s'ils gagnaient personne n'aurait pu se réjouir avec eux. Alors ils optent pour la gloire publique, tant qu'à gagner autant le faire au milieu d'une foule. Il y aura bien un ou deux "vidéastes" pour immortaliser l'instant. Ils veulent que leur potentiel bonheur soit vu et su, mais ce n'est que pour montrer aux autres qu'il existe encore des gens heureux, pas pour partager l'argent. De toute façon le "monde d'après" n'est pas prêt, de trop grands changements lui seraient nuisibles.... Le refus du partage devient alors un acte de charité qui, comme chacun le sait commence par soi-même, dans le bon ordonnancement...du monde d'avant.

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