mercredi 4 septembre 2019

Vagabondages.

   Comme tous les jours ou presque, je suis parti marcher sans autre but que de marcher toujours plus longtemps, plus loin jusqu'à n'en plus pouvoir revenir mais ce n'est pas pour tout de suite! Pour l'instant mes marches ressemblent plus à des promenades qu'à des randonnées, ce qui me permet d'observer, pour le simple plaisir que cela peut procurer.
   Une fois n'est pas coutume, en lieu et place des plantes et des animaux je décidais d'observer les humains ou considérés comme tels pour certains. La rentrée étant passée par là, ce n'est plus la même race d'humains qui errent sur les côtes malouines, il n'y a plus d'enfants, ni même de famille d'ailleurs, c'est devenu le domaine des célibataires en vacances. C'est sans doute ce qui a motivé l'écriture de ce texte, je me suis donc assis sur un rocher un peu isolé afin de me faire plus discret, un homme grand, bronzé et aux yeux bleus attire les regards dans ces zones de chasse!
   Je me retrouvais en léger surplomb d'une plage sous un soleil radieux, comme souvent en Bretagne, le temps idéal pour se lancer à la recherche du bronzage perdu, qui n'a visiblement pas même été trouvé par certains, tout le monde ne peut être Breton. Nous sommes en septembre, un mois trompeur en Bretagne, le soleil y tape toujours avec la même intensité mais ces touristes n'ont pas l'air de s'en préoccuper, tant qu'ils ne sont pas passés au rouge!
   Mais le phénomène le plus étrange de cet étalage de viande est la solitude de la plupart des protagonistes, ils mettent une certaine distance entre eux, comme pour mieux s'éviter, je comprends pourquoi ils sont toujours célibataires. Quelques uns d'entre eux profitent de la marée d'équinoxe pour aller pêcher à pied, errant le long du rivage ils n'ont pas même de besace où déposer leurs quelques trouvailles, mais peu importe semble-t-il, ils ne font que s'occuper.
   Il y a aussi ceux qui lisent, plongés dans leurs livres mais cela ne semble être que pour se donner une raison d'être là, je me sens toutefois plus proche d'eux que de ces obsédés de l'écran de téléphone, tous âges confondus ils font preuve de la même concentration.
   Un détail se fit alors jour, ce ne sont ni des livres, ni des téléphones qui importent, ils ne sont là que pour faire écran au désir de certains de sympathiser. Il semble d'ailleurs que ce soit une nouvelle façon de ne pas communiquer, les personnes seules qu'il m'arrive de croiser sur les chemins balisés ont souvent un coup de fil à passer juste à ce moment, particulièrement les femmes, juste pour ne pas se dire bonjour. Cela tourne à la peur des rencontres, adresser la parole à un inconnu est devenu incongru, sauf pour les femmes âgées qui ne craignent plus rien d'un inconnu, à leurs visibles désarroi.
   Bon, je ne supporte pas l'immobilité alors j'ai repris le cours de mon cheminement, croisant des promeneurs de chiens, qui eux aussi ne saluent pas, occupés qu'ils sont à empêcher leurs animaux de venir me saluer, les chiens sont plus polis que leurs maîtres! Les seuls personnes qui répondent à mon salut sont ces skieurs sans skis, marchant avec des cannes, ils ne peuvent se donner l'air préoccupé, leurs mains étant occupées alors ils marmonnent un bonjour contraint, mais c'est mieux que rien.
   Le constat est terrible, si même une pipelette comme moi n'arrive plus à trouver une simple oreille attentive il est grand temps de s'en inquiéter, le repli sur soi-même n'est jamais de bon augure. Voilà, le titre de ce texte m'a été inspiré par toutes ces personnes qui, loin de répondre à mon simple salut, me jaugent du regard comme le plus vil des vagabonds. Je devrais trouver cela flatteur puisque les seules personnes qui communiquent encore sont ces fameux vagabonds, même s'ils ont un intérêt à m'adresser la parole, au moins sont-ils polis et aimables!

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